Publié le 26 Novembre 2011
Depuis que je suis en formation de secrétaire médicale et médico-sociale, j'ai un autre regard sur le monde. Cette année, avec mon badge de la Croix-Rouge et mon gilet fluo au logo de la Banque Alimentaire de Bordeaux et de la Gironde, j'ai donc décidé de participer aux deux jours de collecte nationale, organisés les 25 et 26 novembre, et de faire partie des 100.000 bénévoles présents (3.000 en Gironde) sur 9.000 points de vente.
Le principe est simple : donner une petite part de ses courses (en priorité des denrées non périssables : pâtes, riz, huile, café, thé, sucre, conserves de viande, de poisson, de fruits, de légumes) dans le but de sauver des familles.
J'ai donc passé mon vendredi après-midi à l'entrée d'une grande enseigne, Carr*four pour ne pas la nommer, munie de mon plus joli sourire, à distribuer des sacs plastique aux chalands venus remplir leurs caddies : "Bonjour Madame, vous connaissez la Banque Alimentaire" ? "Bonjour, Messieurs-dames, puis-je vous proposer de participer à la collecte de la Banque Alimentaire qui a lieu ce week-end, comme chaque année" ? "Bonjour, souhaitez-vous participer à l'action de la Banque Alimentaire" ? etc. etc. etc...
L'expérience fut des plus enrichissantes, humainement parlant ; j'ai été fière de participer à ce grand mouvement national de solidarité mais, en même temps, je me suis beaucoup amusée à observer le comportement des gens :
Les habitués... qui sont encore à 3 mètres mais qui déjà tendent la main pour prendre la poche en lançant "Des pâtes et des conserves ? Comme les autres années ?"
Les accros du petit écran (les mamies surtout) : "Oui, oui, la Banque Alimentaire, y z'en ont parlé à la télé au journal de la 1ère chaîne". Euh, j'ai pas la télé, mais ça fait des années qu'on dit plus "la 1ère chaîne", non ?
Les effrayés... qui font tout pour vous éviter. Ils font un graaannd détour pour esquiver le stand des bénévoles... Sans doute pensent-ils qu'on a un truc à vendre ? Ou alors qu'on sent le pâté ? On a juste envie de leur courir après et de les poursuivre en montrant nos griffes et en faisant "groooooaaaaaaarrrr".
Les jeunes : "Mais Madame, nous on n'est pas venu pour acheter à manger, on vient juste pour acheter à boire"... Bon ben... Bonne soirée alors...
Les radins : "Est-ce que c'est déductible des impôts ?" Ben évidemment, pas de problème, revenez me voir et je vous ferai un reçu pour 66 % de votre demi-boîte de choucroute. Y'a pas de petites économies, hein, on aurait tort de se priver !
Les extra-terrestres... qui ont dû passer les dix dernières années dans la 4ème dimension car ils vous regardent d'un air paumé genre : "Quoi ? La quoi ? La Banque ? Quelle banque ?"
Les menteurs : "Non merci, j'ai déjà donné hier" ! Hier ? Mais hier c'était jeudi et la collecte c'est que vendredi et samedi, alors...
Les bavards... en général des personnes âgées, qui ont du temps à perdre et sont tout contents d'avoir une oreille attentive qui les écoute : "Moi aussi je me souviens quand j'étais bénévole en 1912"...
Les amis des animaux... qui donnent... des croquettes pour les chiens ! Ben oui, quoi ! "Quand les gens n'ont pas d'argent pour acheter à manger les chiens aussi sont malheureux, ça fera plaisir à une famille". Plutôt une bonne idée, j'y aurais pas pensé mais l'essentiel c'est de donner, non ?
Les râleurs : "Mais vous n'êtes pas avec Coluche, vous ? Alors il faut donner à Coluche, il faut donner à la Banque Alimentaire, il faut donner à l'Etat, il faut donner à tout le monde" ! Euh.... Faut pas s'énerver Monsieur, c'est pas obligatoire, chacun fait comme il le sent...
Les prudents : "Moi je donne tant que je peux donner, ce ne sera peut-être pas toujours le cas".
Les couples pas sur la même longueur d'onde... Madame dit "Non merci !" et en même temps Monsieur dit "Pourquoi pas ?"... Faudrait quand même vous mettre d'accord !
Les généreux... qui ne prennent pas une mais TROIS poches et qui les ramènent pleines à craquer alors qu'ils ne venaient que pour acheter une bricole. "On ne donne qu'une fois par an, alors on donne... puisqu'on peut le faire" !
Les avec qui on ne peut pas négocier : ils disent "NON" d'emblée. Moi j'oserais pas mais comme ça, au moins, c'est clair !
Les qui ont tellement de temps à perdre qu'ils font leurs courses deux fois par jour... "J'ai déjà donné ce matin en faisant mes courses à C*sino". C'est ça oui, bien sûr !
Les perdus ? "Non merci, je ne viens pas faire mes courses". Ah, ben t'es là pour quoi alors ? Pour le match de foot ?
Les dragueurs qui veulent vous tripoter le badge sous prétexte qu'ils n'arrivent pas à lire votre prénom. "Et c'est comment votre petit nom ? Ah Vivi ! Oh, mais comme c'est mignon". Oui, bon ben c'est pas tout ça, mais j'ai du boulot moi.
Les négationnistes... qui pensent que, s'ils ne vous regardent pas, vous n'existez pas.
Je pourrais continuer la liste, il y avait vraiment de quoi faire mais, le mieux, c'est quand même quand les gens reviennent, une fois leurs courses terminées, déposer leur sac plastique rempli de victuailles. On a envie de leur sauter au cou et de les embrasser.
Bientôt, ce fut l'heure de la relève... D'autres bénévoles sont arrivés. A nous tous, nous avons rempli un camion de nourriture qui sera triée la semaine prochaine, puis distribuée tout au long de l'hiver à près de 150 associations qui viendront se servir dans les entrepôts.
Si vous pouvez, vous aussi, donnez...